Depuis quelques semaines, la qualité des services de télécommunications mobiles au Cameroun ne cesse de se dégrader. Dans un communiqué publié le 11 septembre 2024, l’Agence de régulation des télécommunications (ART) a pointé la « dégradation continue » du réseau national de fibre optique, tout en appelant à une réévaluation des conditions de sa maintenance. Le directeur général de MTN Cameroon partage cette préoccupation. Dans une interview exclusive accordée à Investir au Cameroun, elle exprime son inquiétude face à la recrudescence des coupures de la fibre optique dans le pays, et propose des solutions pour une meilleure gestion de cette infrastructure, actuellement sous la responsabilité de l’opérateur public Camtel.
La Zambienne revient également sur les solides résultats financiers enregistrés depuis son arrivée à la tête de la filiale camerounaise du géant sud-africain des télécommunications en septembre 2022, malgré le gel des comptes bancaires de l’opérateur, suite à un différend avec des entreprises liées à l’homme d’affaires camerounais Baba Danpullo. Forte de ses dix années d’expérience au sein du groupe, elle évoque aussi les répercussions possibles de ce contentieux sur la présence de MTN au Cameroun, ainsi que l’impact potentiel de l’arrivée de Starlink sur le marché des télécommunications du pays. Elle fait, par ailleurs, le point sur les investissements de MTN au Cameroun et son projet de déploiement de la 5G dans le pays.
Investir au Cameroun : En prenant vos fonctions de DG en septembre 2022, vous avez exprimé l’ambition de dépasser les 50 % de parts de marché et les 10 millions d’abonnés que MTN Cameroon revendiquait au 31 décembre 2021. Où en êtes-vous, deux ans plus tard ?
Mitwa Ng’ambi : Ces deux dernières années ont été passionnantes pour MTN Cameroon et, pour moi personnellement. Elles m’ont donné l’opportunité de mieux comprendre le Cameroun en tant que pays, ainsi que son peuple et son environnement commercial. Je suis fière de voir le chemin parcouru par MTN Cameroon au cours des deux dernières années.
Je me souviens effectivement comme vous le rappelez si bien, qu’à mon arrivée au Cameroun il y a deux ans, une de nos ambitions était de s’assurer que MTN demeure leader de ce marché, avec plus de 50 % de part de marché. Je crois pouvoir dire que nous restons leader du marché. Nous nous situons au-dessus de 50 % de part de marché et de part de valeur à la fin du premier semestre 2024. Nous en sommes particulièrement fiers.
En termes de chiffre d’affaires, nous avons enregistré l’année dernière, une croissance de 12 % par rapport à l’année précédente. Cette croissance est soutenue, naturellement par nos services traditionnels dont la voix et les données (data), mais aussi par une progression significative des services mobile money.
Je dois d’ailleurs dire que la tendance positive observée l’année dernière, se poursuit en 2024 et nous nous attendons à ce qu’elle se maintienne en 2025, voire au-delà. Globalement, MTN Cameroon a réalisé d’excellentes performances et nous pensons que ces performances représentent une croissance durable non seulement pour 2024, mais pour l’avenir.
IC : En 2023, le chiffre d’affaires de MTN Cameroon a atteint près de 326 milliards de FCFA. Le bénéfice avant impôt s’est élevé à 123 milliards de FCFA, soit près de 38 % du chiffre d’affaires, la meilleure marge depuis 2019. Les actionnaires doivent être fiers de vous. Comment êtes-vous parvenue à ce résultat ?
MN : C’est une expérience passionnante jusqu’ici. Nous devons une grande partie de nos bonnes performances aux équipes de MTN Cameroon qui abattent un travail exceptionnel. Un certain nombre d’éléments expliquent comment nous sommes parvenus à augmenter l’EBITDA et les marges bénéficiaires. Tout d’abord, comme vous l’avez mentionné, il y a la croissance du chiffre d’affaires. Pour améliorer les marges, il faut faire croître le chiffre d’affaires. Nous avons réalisé une croissance significative, non seulement dans les services de base tels que la voix, mais aussi dans des segments tels que les données. Avec l’adoption progressive des services internet dans tout le pays, la consommation des données a augmenté d’au moins 20 % chaque année au cours des deux dernières années, et nous prévoyons une croissance similaire pour 2024.
Le Cameroun reste un cas d’investissement très intéressant pour les acteurs du secteur privé. Nos taux d’inflation, même s’ils ont augmenté, restent relativement stables par rapport à la région et à d’autres pays du continent. Notre monnaie, indexée sur l’euro, reste relativement stable par rapport à certains marchés indexés sur le dollar. Ces micro-indicateurs font du Cameroun un marché attractif.
Nous observons également une croissance significative sur le mobile money. C’est le secteur qui connaît la croissance la plus rapide, portée par la forte demande de ces services. Plus de 5 millions de personnes effectuent des transactions sur la plateforme de notre filiale Mobile Money Corporation.
Nous sommes également très reconnaissants à l’équipe et aux parties prenantes d’avoir amélioré l’efficacité de l’entreprise. C’est une chose d’augmenter le chiffre d’affaires, mais si notre profil de coûts n’est pas correct, nous diluons nos marges. Évidemment, les actionnaires sont satisfaits parce qu’ils constatent une discipline en matière de coûts, sans gaspillage. Toute cette discipline permet de créer une entreprise plus performante sur la durée.
IC : Entre juin 2022 et juin 2023, MTN Cameroon a enregistré la meilleure performance parmi les filiales de MTN en Afrique francophone, dépassant même la Côte d’Ivoire, qui compte plus d’abonnés. En outre, les marges d’exploitation ont augmenté de 17 % au Cameroun. Peut-on dire que le Cameroun est désormais un véritable moteur de croissance pour MTN sur les marchés francophones ?
MN : Absolument ! Lors de la présentation des résultats semestriels du Groupe MTN qui ont été publiés tout récemment, notre président directeur général, Ralph Mupita, a souligné que le Cameroun est un marché sur lequel il faut mettre l’accent en termes de développement et de croissance. Pour moi, cela s’explique par plusieurs raisons.
Le Cameroun reste un cas d’investissement très intéressant pour les acteurs du secteur privé. Nos taux d’inflation, même s’ils ont augmenté, restent relativement stables par rapport à la région et à d’autres pays du continent. Notre monnaie, indexée sur l’euro, reste relativement stable par rapport à certains marchés indexés sur le dollar. Ces micro-indicateurs font du Cameroun un marché attractif.
En outre, le Cameroun dispose d’un potentiel important en termes d’opportunités de marché, de ressources et d’esprit d’entreprise. Notre population jeune représente les leaders et les clients à forte valeur ajoutée de demain. Tous ces indicateurs font du Cameroun un marché très attractif pour l’investissement.
Lorsque le Groupe MTN enregistre de bons résultats au Cameroun nous sommes fiers de représenter un énorme marché potentiel pour la croissance future, non seulement pour MTN au Cameroun, mais aussi pour le Groupe MTN dans son ensemble. Ce potentiel va au-delà de notre entreprise et s’étend au paysage économique plus large du Cameroun.
IC : Ces performances apparaissent d’autant plus exceptionnelles qu’elles ont été réalisées dans un contexte particulier. Quelques jours après votre arrivée à la tête de MTN Cameroon, les comptes de l’entreprise ont été saisis par la justice à la demande de sociétés liées à l’homme d’affaires camerounais Baba Danpullo. Comment avez-vous réussi à maintenir l’entreprise en activité et à obtenir de tels résultats ?
MN : Ces deux dernières années ont été assez difficiles, même si elles ont été passionnantes. Je dois nos bons résultats à l’esprit combatif des équipes de MTN Cameroon. Lorsque cet incident s’est produit il y a deux ans, personne n’aurait pu imaginer que nous en serions là aujourd’hui. Cela fait deux ans que cette affaire n’a pas été résolue, mais je tiens à remercier les équipes, le Conseil d’administration et toutes les parties prenantes qui nous ont soutenus jusqu’à présent.
En ce qui concerne l’affaire au plan juridique, comme nous l’avons déjà dit, elle ne concerne pas du tout MTN Cameroon. Il s’agit d’une affaire entre Bestinver et des sociétés qui n’ont aucun lien avec nous. Nous avons maintenu notre position : MTN est une entreprise citoyenne responsable et n’a rien à voir avec cette affaire.
Pour assurer la continuité des activités, nous avons essayé de séparer les questions juridiques des opérations commerciales parce que nous comprenons notre rôle au Cameroun. Indépendamment de ce qui se passe, nous avons toujours la responsabilité de fournir des services de connectivité à près de 13 millions de personnes qui dépendent de nous pour les appels, les transferts d’argent, l’accès à l’internet, etc.
Nous avons clairement séparé le front juridique des opérations commerciales. Nous sommes confiants, car nous savons que nous n’avons rien à voir avec cette affaire, ce qui nous permet de continuer à remplir notre mandat sans nous laisser distraire. Cette affaire a-t-elle été une source de distraction pour l’entreprise ? Oui, cela a été une distraction majeure. Mais nous sommes confiants et espérons que notre position juridique s’avérera correcte, et nous attendons du système judiciaire qu’il mène cette affaire à une conclusion plus positive pour MTN.
IC : Dans vos interactions avec les autorités, vous avez souvent souligné les conséquences négatives que cette affaire pourrait avoir sur la durabilité des activités de MTN au Cameroun. Vos résultats tempèrent-ils quelque peu ces inquiétudes ?
MN : Indépendamment de ce qui arrive à MTN en tant qu’entreprise, nous savons que nous avons toujours l’obligation de fournir nos services aux consommateurs. Notre priorité a été de ne jamais compromettre les services que nous fournissons ou l’intégrité des portefeuilles mobile money des clients. Nous nous sommes concentrés sur ce point et, par conséquent, nos clients nous ont fait confiance en restant fidèles à notre réseau, ce qui nous a permis de maintenir notre activité.
L’affaire Bestinver a-t-elle été un défi ? Absolument. Mais est-ce suffisant pour que nous quittions le Cameroun ? Absolument pas. Nous restons persuadés que notre histoire avec le Cameroun et l’avenir que nous prévoyons pour les parties prenantes suffisent à résoudre les problèmes qui surviennent en cours de route, y compris l’affaire Bestinver.
Grâce à nos divers engagements avec les autorités, je pense qu’il est généralement admis que dans le secteur privé, en particulier avec des entreprises citoyennes engagées comme nous, certaines choses doivent être mises en place pour que les règles du jeu soient les mêmes pour tous. L’un de ces éléments est le système judiciaire. Comme je l’ai mentionné précédemment, nous sommes convaincus qu’avec le temps, la vérité sur cette affaire sera révélée et qu’elle sera résolue d’une manière acceptable pour toutes les parties.
Nous restons attachés au Cameroun et à la fourniture de nos services, quels que soient les défis auxquels nous sommes confrontés. Nous continuons à nous concentrer sur nos clients et sur le maintien de la qualité et de la fiabilité de notre réseau et de nos services.
IC : Dans les milieux d’affaires, ce différend est perçu comme une dégradation du risque associé à l’investissement privé au Cameroun. Est-ce également la perception de MTN ? Cette affaire pourrait-elle éventuellement amener le groupe à reconsidérer sa présence dans le pays ?
MN : MTN est présent au Cameroun depuis 24 ans, et nous fêterons notre 25e anniversaire l’année prochaine. Ce n’est pas une courte période. Nous nous considérons comme des citoyens du Cameroun. Le président du groupe MTN parle souvent du positionnement de MTN sur le continent en tant que seule marque de télécommunications de notre taille née en Afrique pour l’Afrique. Nous n’allons nulle part. L’Afrique est notre continent et le Cameroun est notre pays.
Bien sûr, nous aimerions que les choses se passent mieux que par le passé. Mais je dis souvent à mon équipe : si MTN ne participe pas activement sur le continent à la fourniture de solutions numériques pour l’Afrique ou le Cameroun, qui le fera ? Nous sommes ici en tant qu’Africains pour l’Afrique, et en tant que Camerounais pour les Camerounais, parce que nous voulons voir l’industrie se développer et croître.
Y a-t-il des défis à relever ? Oui. L’affaire Bestinver a-t-elle été un défi ? Absolument. Mais est-ce suffisant pour que nous quittions le Cameroun ? Absolument pas. Nous restons persuadés que notre histoire avec le Cameroun et l’avenir que nous prévoyons pour les parties prenantes suffisent à résoudre les problèmes qui surviennent en cours de route, y compris l’affaire Bestinver.
IC : Les bons résultats de l’entreprise depuis votre arrivée se sont-ils reflétés dans l’action sociale de MTN au Cameroun ? Combien y avez-vous consacré en deux ans ? Et, brièvement, quelles actions avez-vous entreprises et pourquoi ?
MN : Le développement communautaire est extrêmement important pour MTN. Nous obtenons notre licence d’exploitation non seulement des autorités de réglementation, mais aussi des communautés que nous servons. La Fondation MTN a été créée pour se concentrer uniquement sur le développement communautaire, en consacrant 1 % de nos bénéfices à ses projets.
L’amélioration de nos performances au cours des deux dernières années nous a permis de contribuer davantage à la Fondation. Nous avons consacré environ 350 millions de francs par an, soit un total d’environ 1 milliard de francs pour 2022-2024. Ces projets se concentrent sur quatre thèmes clés : l’éducation, l’autonomisation des jeunes, la santé et les priorités nationales du Cameroun.
Bien qu’il soit nécessaire de facturer les services pour maintenir la qualité et stimuler l’innovation, nous cherchons toujours des moyens de réduire les coûts. Au cours des deux dernières années, nous avons réussi à réduire le prix des données de plus de 15 %. Nous avons également introduit de nouveaux services tels que MTN No Limit, conçu pour les particuliers ayant des besoins d’utilisation plus importants à des tarifs plus abordables.
Parmi les projets notables, citons MTN Kawtal, qui vise à inclure les personnes handicapées en rendant nos produits, nos services et nos métiers plus accessibles. Nous avons également mis en place des programmes éducatifs en collaboration avec le ministère des Enseignements secondaires.
Récemment, nous avons commencé à établir des partenariats avec d’autres entreprises du secteur privé dans le cadre du One Goal Alliance. Nous avons réalisé que beaucoup d’entre nous menaient des projets similaires, et nous avons donc décidé de mettre nos ressources en commun pour avoir un plus grand impact. Nos partenaires sont, entre autres, IHS, UBA, Huawei, Dangote, Chanas Assurances et MW.
Cette approche collaborative nous permet d’avoir un impact plus important dans le domaine de l’éducation et dans d’autres domaines. Nous avons investi environ 1 milliard de francs jusqu’en 2024, mais nous nous attendons à des investissements encore plus importants à l’avenir grâce à ces partenariats. C’est une évolution passionnante qui me rend fière de nos efforts en matière d’engagement communautaire.
IC : Il y a quelques jours, une association de consommateurs a demandé au gouvernement de sanctionner MTN Cameroon et les autres opérateurs pour la mauvaise qualité de service. Au début de l’année dernière, plusieurs abonnés ont exprimé leur mécontentement à travers le mouvement appelé « Mode Avion », dénonçant la qualité du service et les prix élevés. Comment parvenir à satisfaire à la fois les actionnaires et les abonnés ?
MN : Chez MTN, nous accordons la priorité à nos clients, car ils sont le fondement de notre entreprise. Nous sommes par conséquent en permanence à l’écoute de nos clients, et en particulier à la suite du mouvement « Mode Avion » de l’année dernière.
S’agissant de la tarification et de l’accessibilité, nous cherchons constamment à nous améliorer au fur et à mesure que nous nous développons. Bien qu’il soit nécessaire de facturer les services pour maintenir la qualité et stimuler l’innovation, nous cherchons toujours des moyens de réduire les coûts. Au cours des deux dernières années, nous avons réussi à réduire le prix des données de plus de 15 %. Nous avons également introduit de nouveaux services tels que MTN No Limit, conçu pour les particuliers ayant des besoins d’utilisation plus importants à des tarifs plus abordables.
Nous sommes conscients que les consommateurs sont de plus en plus attentifs aux normes de service, et il est de notre responsabilité de répondre à ces attentes. En réponse au Mouvement « Mode Avion », nous nous sommes rapidement engagés à réaliser d’importants investissements dans le réseau. Nous nous sommes engagés à consacrer environ 30 milliards de francs CFA par an à l’expansion et à l’amélioration de la qualité de notre réseau.
Nous reconnaissons que le mobile money répond à un besoin d’inclusion financière auquel les services bancaires traditionnels ne répondent souvent pas. Nous ne prévoyons pas d’augmentation continue des prix. En fait, à mesure que nous nous développons et que de plus en plus de personnes adoptent le service, nous prévoyons d’optimiser les frais en faveur des consommateurs au fil du temps.
Notre activité exige des investissements continus pour suivre l’évolution des modes de consommation. Nous avons pris cet engagement à long terme envers les autorités et le peuple camerounais. Cependant, nous sommes confrontés à des défis externes, tels que l’instabilité de l’électricité, qui affecte la qualité de nos services. Pour y remédier, nous investissons dans des sources d’énergie alternatives telles que l’énergie solaire et les générateurs, tout en collaborant avec des entités telles qu’Eneo pour garantir une alimentation électrique plus fiable.
Un autre défi important est notre dépendance à l’égard d’un tiers pour la fibre optique afin d’assurer l’interconnectivité entre les villes. Nous constatons aujourd’hui une augmentation des coupures de fibre dues à divers facteurs. Il est nécessaire de collaborer activement avec nos partenaires en charge de la gestion de cette infrastructure essentielle, afin d’assurer sa stabilité.
La qualité du service est en tête de liste des priorités de mon agenda en tant que DG et pour toute l’équipe de MTN. Pour les facteurs qui relèvent de notre contrôle, nous assurons à nos clients que des plans complets sont en place pour une amélioration continue. En ce qui concerne les facteurs externes, nous maintenons un engagement permanent avec les autorités afin de nous assurer que nous recevons le soutien nécessaire pour améliorer la qualité de nos services.
Notre engagement envers le Cameroun va au-delà de la simple fourniture de services. Nous sommes déterminés à relever les défis, tant internes qu’externes, afin d’offrir la meilleure expérience possible à nos clients tout en contribuant au progrès technologique du pays.
IC : En 2023, les revenus des services fintech ont connu une augmentation de près de 44,5 %, attribuée en partie à une hausse progressive des coûts de ces services au fil des ans. Avez-vous l’intention de maintenir cette trajectoire ? Si oui, comment répondrez-vous aux préoccupations potentielles concernant l’impact sur l’inclusion financière, que ces services sont également censés soutenir ?
MN : Le parcours de mobile money est fascinant. Comme je l’ai mentionné précédemment, c’est l’un des secteurs d’activité de MTN Cameroon qui connaît la croissance la plus rapide, non seulement en raison des coûts, mais aussi en raison de son adoption généralisée dans le pays. L’inclusion financière est une priorité majeure pour nous, et nous nous efforçons de la rendre aussi abordable que possible pour les consommateurs.
Cela dit, l’écosystème de mobile money implique certains coûts. Pensez aux agents que vous voyez dans la rue, assis sous des parasols ou dans des kiosques. Pour chaque transaction qu’ils effectuent, ils perçoivent une commission. Il faut donc prévoir des frais pour couvrir ce coût.
Dans l’environnement du mobile money, nous ne considérons pas les services individuels et leurs frais spécifiques. Nous considérons plutôt l’offre globale que nous proposons aux consommateurs. Nous trouvons constamment un équilibre entre les différents services. Si nous facturons des frais pour les transferts de personne à personne ou les transactions de détail, vous constaterez que les paiements pour des services publics comme Eneo (électricité) ou Camwater (eau) sont totalement gratuits.
Comme notre président de groupe l’a dit l’année dernière, le plan était d’investir au moins 225 millions de dollars au Cameroun sur trois ans, à savoir 2023, 2024 et 2025. Nous sommes sur la bonne voie en ce qui concerne ce profil d’investissement.
Nous sommes toujours à la recherche de moyens pour rendre nos services plus accessibles et plus abordables. Nous reconnaissons que le mobile money répond à un besoin d’inclusion financière auquel les services bancaires traditionnels ne répondent souvent pas. Nous ne prévoyons pas d’augmentation continue des prix. En fait, à mesure que nous nous développons et que de plus en plus de personnes adoptent le service, nous prévoyons d’optimiser les frais en faveur des consommateurs au fil du temps.
Toutefois, cela dépendra également de l’évolution de notre profil de coûts. Nous voulons nous assurer que nous maintenons une certaine qualité de service pour nos clients, ce qui signifie que nous devons couvrir nos coûts opérationnels par des frais. C’est une question à laquelle nous réfléchissons constamment, car notre objectif est de voir chaque Camerounais posséder un compte d’argent mobile, ce qui lui permettrait d’effectuer facilement des transactions financières.
IC : En début d’année dernière, le régulateur (ART) a annoncé que Camtel, Orange et MTN s’étaient engagés à investir 156 milliards de FCFA en 2023 pour mener des « actions prioritaires » afin de remédier aux déficiences identifiées lors des contrôles de performance de vos réseaux, organisés au cours du second semestre 2022. Quel était le montant de l’engagement de MTN ? Cet engagement a-t-il été respecté ? Dans l’affirmative, quelles réalisations concrètes ont été effectuées ?
MN : Absolument ! Comme je l’ai dit, le secteur a annoncé collectivement 150 milliards l’année dernière, et la part de MTN a été de 30 milliards. Cela ne concerne que le réseau. Lorsque je parle de ces investissements, il y a beaucoup d’autres domaines dans lesquels nous investissons, comme le mobile money, les plateformes informatiques et l’environnement de distribution. Mais pour le réseau lui-même, nous avons engagé et investi 30 milliards l’année dernière. Nous avons prévu un montant similaire pour cette année.
IC : Le 26 août 2023, lors d’une rencontre avec le Premier ministre Joseph Dion Ngute, le PDG du Groupe MTN a annoncé que la filiale camerounaise prévoit d’investir plus de 200 millions de dollars (plus de 120 milliards de FCFA au taux de change actuel) dans la technologie et les services de réseau au cours des trois prochaines années. En outre, 25 millions de dollars (plus de 15 milliards de FCFA) seront alloués au renforcement des activités fintech par le biais de sa filiale Mobile Money Corporation. Ce plan d’investissement englobe-t-il également les engagements pris auprès de l’autorité de régulation ? En outre, quel est l’état actuel de sa mise en œuvre ?
MN : Lorsqu’un président de groupe fait une telle déclaration, vous pouvez être sûr qu’il s’agit d’un engagement qui sera honoré. Comme notre président de groupe l’a dit l’année dernière, le plan était d’investir au moins 225 millions de dollars au Cameroun sur trois ans, à savoir 2023, 2024 et 2025. Nous sommes sur la bonne voie en ce qui concerne ce profil d’investissement.
Environ 60 millions de dollars ont déjà été intégrés dans le plan de réseau de l’année dernière. Nous prévoyons un montant similaire cette année, y compris des investissements dans notre environnement informatique. Comme vous le savez, les technologies évoluent rapidement, avec l’avènement d’innovations comme l’IA (intelligence artificielle), et nous tenons donc à ce que cet environnement mûrisse également au sein de MTN.
Vous verrez le solde en 2025, où notre ambition n’est pas seulement d’améliorer la qualité, mais aussi de nous étendre agressivement dans diverses régions en termes de connectivité. Nous sommes donc bien partis pour honorer cet engagement de 225 millions de dollars.
IC : Au début de l’année dernière, vous avez exprimé l’ambition de faire de MTN le premier opérateur 5G au Cameroun. Quelles actions ont déjà été entreprises pour réaliser cette ambition, et quand pensez-vous pouvoir la concrétiser ?
Je pense qu’il n’y a pas d’obstacle, avant tout. Il est important de le préciser. Dans l’évolution naturelle des technologies, certaines choses doivent être en place avant que nous puissions lancer une technologie future. Ce fut le cas avec la 3G, la 4G et maintenant avec la 5G.
La première chose à faire pour déployer des technologies comme la 5G est de préparer le cadre réglementaire. Je suis très satisfaite des progrès que nous avons réalisés en tant qu’industrie, sous la direction de Son Excellence, le ministre des Postes et des Télécommunications. Nous travaillons sur des études concernant le cadre de la 5G, ses cas d’utilisation, etc., qui créeront une plateforme pour un cadre réglementaire pleinement établi.
En même temps, nous sommes très préoccupés par le nombre de coupures de fibre que nous constatons dans le secteur. Au mois d’août, nous avons enregistré le plus haut niveau d’instabilité de la fibre, ce qui a un impact direct sur notre capacité à fournir un service de qualité à nos clients. Notre approche implique un engagement étroit avec Camtel pour gérer les défis actuels, mais aussi pour planifier l’avenir.
Ce travail est en cours et MTN y contribue sous la direction du ministère. Une fois achevé, il ouvrira la voie aux futures technologies telles que la 5G au Cameroun. Entre-temps, au sein de MTN Cameroon, nous veillons à ce que notre réseau soit prêt pour des mises à niveau telles que la 5G. Cette année, nous avons procédé à une modernisation importante de notre réseau, le rendant prêt pour la 5G. Ainsi, lorsque les cadres réglementaires seront achevés et les licences obtenues, l’activation de la 5G sera beaucoup plus facile.
Nous avons également pris contact avec le ministère au sujet d’une éventuelle expérimentation de la 5G. Bien entendu, nous n’irons de l’avant que lorsque les autorisations nécessaires auront été données. Donc, d’une part, nous participons activement à la préparation de la réglementation et, d’autre part, nous nous préparons techniquement pour nous assurer qu’une fois le cadre réglementaire prêt et approuvé, nous pourrons apporter cette étape importante au Cameroun avec la livraison de la 5G.
IC : D’après ce que vous dites, le déploiement d’un réseau 5G semble encore loin…
MN : Cela dépend vraiment des conditions préalables, comme je l’ai mentionné. Pour tout pays qui évolue vers des technologies, qu’il s’agisse de la 4G ou de la 5G, la principale étape consiste à préparer le cadre réglementaire. Je pense que les autorités y travaillent. Avec le temps, ce devrait être quelque chose que nous pourrons célébrer en tant qu’industrie — une étape importante pour le Cameroun.
IC : La qualité des services numériques dépend actuellement du développement du réseau de fibre optique. Au Cameroun, l’État a choisi de confier cette responsabilité exclusivement à l’entreprise publique Camtel. Sans remettre en cause cette décision souveraine, comment faire pour que cette infrastructure réponde aux besoins actuels ?
MN : Je pense que l’une des choses qui a bien fonctionné dans l’industrie camerounaise est la plateforme de collaboration entre tous les détenteurs de concessions. De nombreux défis et opportunités y sont discutés. Comme vous l’avez dit, il s’agit d’une décision souveraine qui doit être respectée. En même temps, MTN, comme beaucoup d’autres entreprises, apporte son expérience et son expertise d’autres parties du continent pour améliorer les modèles de fourniture d’infrastructures à fibre optique dans le pays.
source:investiraucameroun